Dans ce tour du monde du sommeil, nous nous arrêtons aujourd’hui en Suède !
Petite framboise : Bonjour à vous deux, avant toute chose, je vous laisse vous présenter brièvement ainsi que votre jolie famille.
Elin : Oui bien-sûr ! Je suis Elin, j’ai 32 ans, je suis née à Paris, puis nous avons déménagé en Suède (pays de son père) très rapidement, j’avais moins de 6 mois. Je suis cheffe de projets digitaux et l’heureuse maman de Viggo qui a 8 ans et de Freja qui vient d’avoir 18 mois.
Johan : Moi c’est Johan, Suédois pure souche, j’ai 36 ans et je suis ingénieur agronome.
Petite framboise : Merci, Elin et Johan, de prendre le temps de discuter avec nous aujourd’hui. Nous allons donc parler des pratiques de sommeil en Suède. Comment avez-vous abordé le sommeil de Freja, votre fille de 18 mois, et de Viggo, quand il était plus jeune ?
Elin : Merci à toi de nous recevoir. En Suède, le sommeil des enfants est souvent abordé avec beaucoup plus de souplesse et d’empathie qu’en France. Pour Freja, nous avons opté pour ce que l’on appelle le « maternage proximal », qui met l’accent sur la proximité avec le bébé. Cela signifie qu’elle dort souvent près de nous, que ce soit dans un berceau collé à notre lit ou même parfois dans notre lit. Nous croyons que cette proximité favorise un sentiment de sécurité chez l’enfant et aide à instaurer un lien fort dès le début.
Johan : Oui, c’est une pratique assez courante ici. Pour Viggo, nous avions fait quelque chose de similaire. Les bébés suédois dorment près de leurs parents la nuit, et il est courant de répondre rapidement à leurs besoins, que ce soit pour allaiter, changer une couche ou simplement les rassurer. Nous pensons que cette approche respectueuse de leurs rythmes naturels est bénéfique pour leur développement émotionnel.
Petite framboise : Comment gérez-vous les réveils nocturnes ? Comment est-ce perçu en Suède qu’un enfant se réveille la nuit ou qu’il ait besoin d’aide pour s’endormir ?
Elin : En Suède, il n’y a pas de stigmatisation autour des réveils nocturnes des enfants. C’est quelque chose de très normal, et nous l’acceptons comme une phase naturelle du développement. Freja se réveille encore 4 à 6 fois la nuit (enfin je crois, je dors à moitié vu qu’elle prend le sein seule), et nous répondons toujours à ses besoins, que ce soit pour la rassurer, lui donner du lait, ou simplement pour être près d’elle. Ici, on comprend que chaque enfant est différent et que certains ont besoin de plus de soutien pour s’endormir ou se rendormir.
Johan : Oui, les réveils nocturnes sont considérés comme une partie normale de la petite enfance. Beaucoup de parents ici pratiquent le « cosleeping » ou gardent leurs enfants dans une pièce proche pour pouvoir les rassurer rapidement s’ils se réveillent. On ne s’attend pas à ce qu’un jeune enfant dorme toute la nuit sans interruption, et les parents sont encouragés à répondre aux besoins de leur enfant sans se soucier de ce que les autres pourraient penser.
Petite framboise : Est-ce qu’on recommande aux familles suédoises de faire du « sleep training » ou de conditionner leur bébé pour qu’il apprenne à (s’en)dormir seul ?
Elin : En Suède, le « sleep training » ou la méthode consistant à laisser pleurer un bébé pour qu’il apprenne à s’endormir seul n’est pas particulièrement répandu ni recommandé. Nous entendons peu parler de ce que vous appelez « l’endormissement autonome », cela nous semble à vrai dire un peu absurde… Les approches plus douces, qui respectent le rythme naturel de l’enfant, sont privilégiées. Nous croyons que les bébés apprennent à s’endormir seuls lorsqu’ils sont prêts, sans qu’il soit nécessaire de les laisser pleurer ou de les conditionner pour cela. L’accent est mis sur la création d’un environnement sécurisé et aimant où l’enfant peut se sentir en confiance pour s’endormir.
Johan : C’est vrai, il y a un fort accent sur le respect du bien-être émotionnel de l’enfant. Plutôt que de forcer l’indépendance prématurée, nous préférons accompagner nos enfants à leur propre rythme. En ce qui nous concerne, nous n’avons jamais laissé Viggo ou Freja pleurer seuls la nuit (ou à un autre moment). Nous avons toujours été présents pour eux, car nous croyons que cela leur donne une base solide de confiance et de sécurité.
Petite framboise : Est-ce qu’il y a des coachs ou consultantes en sommeil en Suède ? Comment cela est perçu dans votre pays ?
Elin : Oui bien évidemment il y en a aussi, mais quasiment toutes proposent une approche douce, elles aident à trouver un bon équilibre familial, elles rassurent ou conseillent sur l’aménagement de la chambre par exemple. Il y en a bien quelques-unes qui recommandent les méthodes d’entraînement au sommeil, mais celles-ci ne sont franchement pas appréciées et se font régulièrement reprendre par des professionnels de santé qui eux, sont vraisemblablement mieux formés en Suède qu’en France sur le sujet du développement, de l’allaitement et du sommeil.
Petite framboise : D’accord effectivement cela change de la France ! Concernant le sommeil en journée, comment cela se passe-t-il pour vous ?
Johan : Comme pour le reste, on suit autant que possible les besoins des enfants : siestes en contact la première année puis on alterne entre les siestes avec nous ou en extérieur. Les siestes nordiques restent très courantes ici, et cela aide vraiment au sommeil !
Petite framboise : C’est intéressant. Comment le congé parental en Suède a-t-il influencé votre approche du sommeil et du maternage proximal ?
Elin : Le congé parental en Suède est vraiment un avantage énorme pour les familles. Nous avons 480 jours de congé à partager entre les parents, et une grande partie de ce temps est rémunérée (depuis juillet, nous pouvons le partager avec des proches ou les grands-parents par exemple). Cela nous a permis de rester à la maison avec nos enfants pendant leurs premières années, sans le stress de devoir retourner rapidement au travail. Pour nous, cela a facilité le maternage proximal car nous pouvions vraiment nous consacrer à nos enfants, sans précipitation. Cela a aussi permis à Johan de s’impliquer pleinement, ce qui a renforcé notre approche en équipe.
Johan : C’est vrai. Ce congé généreux m’a permis de prendre un rôle actif dès le début, non seulement pour Viggo mais aussi pour Freja. Cela nous a donné la liberté de choisir comment nous voulions organiser nos journées et nos nuits, selon ce qui était le mieux pour nos enfants. En Suède, il y a aussi un soutien social et culturel pour le partage des responsabilités parentales, ce qui rend cette période moins stressante et plus harmonieuse.
Petite framboise : Pensez-vous que ces pratiques de maternage proximal et les politiques périnatales suédoises ont un impact sur la manière dont les enfants se développent ?
Elin : Absolument. Je pense que le maternage proximal, associé à un environnement où les parents ne sont pas pressurisés pour retourner au travail trop rapidement, permet aux enfants de se sentir plus en sécurité et aimés. Cela favorise un développement émotionnel sain. Les enfants apprennent dès le début qu’ils peuvent compter sur leurs parents, ce qui, à mon avis, pose les bases d’une bonne confiance en soi. A travers tes posts sur le sommeil à travers le monde, nous nous rendons compte qu’en Suède, les proches sont un peu moins investis qu’au Japon ou au Guatemala, mais nous n’en souffrons pas trop, nous sommes bien dans notre cocon tous les quatre.
Johan : Je suis d’accord. Le fait que nous puissions passer autant de temps avec eux dans ces moments cruciaux, en respectant leurs besoins naturels, a un effet très positif. Nous avons vu avec Viggo qu’il est devenu un enfant très confiant et sécurisé, et nous espérons que Freja suivra le même chemin. En fin de compte, les politiques périnatales en Suède nous permettent de nous concentrer sur ce qui est vraiment important : nos enfants (et donc les adultes de demain !).
Petite framboise : Merci beaucoup pour ce partage, Elin et Johan. C’est inspirant de voir comment le soutien social et culturel en Suède peut vraiment faire la différence pour les familles et les enfants.
Elin : Merci à vous. Nous sommes reconnaissants de vivre dans un pays où nous pouvons aborder la parentalité de cette manière.
Johan : Oui, c’est un vrai privilège, et nous sommes heureux de pouvoir en parler.
Interview du 17 août 2024