Le cododo, ou sommeil partagé, est une pratique adoptée par de nombreuses familles à travers le monde. Pourtant, une idée préconçue persiste : partager son lit ou sa chambre avec son bébé serait un frein à la vie intime du couple. Mais est-ce vraiment le cas ? Et si, au contraire, le cododo permettait de repenser la sexualité de façon plus épanouie et variée ?
Dans cet article sourcé, faisons le point sur ce sujet en détaillant les réalités du cododo et son réel impact sur la vie intime des parents.
DISCLAMER ⚠️ Il est essentiel de rappeler qu’aucune pression ne doit être exercée sur la reprise de la vie intime après l’accouchement. Chaque couple, chaque individu vit cette période différemment, et il n’y a pas de délai « idéal » pour retrouver une sexualité épanouie. L’important est de s’écouter, de respecter son propre rythme et celui de l’autre. L’intimité ne se résume pas aux rapports sexuels : elle peut commencer par de petits gestes du quotidien, comme un câlin sur le canapé, un regard complice, un mot doux soufflé à l’oreille, un simple « je t’aime ». Ces moments de tendresse sont tout aussi précieux et permettent de renforcer le lien de couple en douceur, sans pression ni attente.
Le cododo : une pratique bénéfique et naturelle
D’un point de vue anthropologique, le cododo est une pratique normale dans de nombreuses cultures. En effet, dans des sociétés où le sommeil partagé est la norme, comme au Japon, en Inde, dans la pays scandinaves ou encore dans certaines communautés d’Afrique et d’Amérique Latine, il est évident que les parents continuent à entretenir une vie sexuelle active. Une étude publiée dans Pediatrics (Blair & Ball, 2004) montre que le cododo répond à un besoin biologique fondamental : il favorise l’attachement parent-enfant et contribue à un sommeil plus sécurisant pour le nourrisson.
De plus, le cododo réduit le stress parental, notamment en facilitant l’allaitement nocturne et en diminuant les réveils prolongés des parents (étude de McKenna & Volpe, 2007). Contrairement à l’idée que cela empêcherait la proximité et l’intimité du couple, il pourrait en réalité aider à créer un environnement familial plus serein, propice aux moments de qualité à deux.
La sexualité : au-delà du lit conjugal
L’idée que la sexualité ne peut s’exprimer que dans le lit conjugal est une construction culturelle moderne. Dans les sociétés préhistoriques, le concept de « lit conjugal » tel que nous le connaissons aujourd’hui n’existait pas. Plusieurs études en anthropologie suggèrent que les humains du Paléolithique dormaient en groupe, souvent dans des abris collectifs ou des espaces partagés avec leur famille et leur tribu. L’intimité sexuelle ne se déroulait donc pas dans ces espaces de repos communs, mais plutôt à l’écart, dans des lieux plus isolés et propices à la discrétion. Pendant des siècles, et encore aujourd’hui dans de nombreuses cultures, le lit parental n’est pas le seul lieu de l’intimité conjugale. Dans Our Babies, Ourselves (Small, 1998), l’anthropologue Meredith Small observe que les parents trouvant des alternatives réussissent à maintenir une vie intime riche et satisfaisante.
Si le cododo impose de repenser les habitudes, il n’interdit en rien les rapports intimes. Il pousse simplement les couples à faire preuve de créativité et à explorer d’autres espaces de la maison : canapé, salle de bain, chambre d’amis, voire même des moments d’intimité volés pendant la sieste de bébé. Beaucoup de parents ayant pratiqué le cododo rapportent d’ailleurs que cela a enrichi leur relation en les forçant à être plus attentifs aux besoins de l’autre et à planifier des moments de complicité.
D’autre part, l’intimité ne se résume pas à l’acte sexuel en lui-même. Le simple fait de partager une expérience commune, de se soutenir mutuellement dans le soin apporté au bébé, peut créer un sentiment d’union et de complicité. Ce lien émotionnel renforcé favorise naturellement le rapprochement intime.
Devenir parent : un impact certain sur la sexualité
Ce qui impacte réellement la vie de couple, ce n’est pas le cododo en lui-même, mais bien l’arrivée d’un enfant et tous les bouleversements qui l’accompagnent. Avoir un bébé modifie la dynamique du couple, non seulement en raison des nouvelles responsabilités, mais aussi à cause de la fatigue accumulée et des changements hormonaux, en particulier chez la mère.
Après l’accouchement, le corps de la femme traverse une période de récupération intense. Les taux d’hormones fluctuent considérablement, notamment avec la chute des œstrogènes et de la progestérone, ce qui peut entraîner une baisse de la libido. Si la maman allaite, la prolactine, hormone favorisant la production de lait, joue également un rôle dans la diminution du désir sexuel. Une étude publiée dans The Journal of Sexual Medicine (Bottcher et al., 2017) met en évidence ces variations hormonales et leur impact sur la sexualité post-partum.
En outre, le manque de sommeil est un des plus grands défis des jeunes parents. Selon une enquête de l’INSERM (2018), les parents d’un nourrisson dorment en moyenne 5 à 6 heures par nuit, souvent en plusieurs segments. Ce déficit de sommeil peut entraîner irritabilité, stress et fatigue physique, autant de facteurs qui influencent directement l’envie et la disponibilité pour des moments intimes.
Le cododo : un allié contre la fatigue parentale
Une autre étude intitulée « Let’s Talk about Sleep Baby: Sexual Activity Postpartum and Its Links with Room Sharing, Parent Sleep, and Objectively Measured Infant Sleep and Parent Nighttime Crib Visits » a été publiée dans le Journal of Sex Research en novembre-décembre 2023. Cette recherche a exploré les liens entre le partage de la chambre avec le nourrisson (cododo), la qualité du sommeil des parents et leur activité sexuelle après l’accouchement.
Les principaux résultats de l’étude indiquent que le partage de la chambre avec le bébé n’a pas d’impact négatif significatif sur la fréquence des relations sexuelles des parents. De plus, une meilleure qualité de sommeil des parents était associée à une activité sexuelle plus régulière. Ces conclusions suggèrent que le cododo, en facilitant le sommeil des parents, pourrait indirectement favoriser une vie sexuelle plus épanouie en période postpartum.
En clair, si l’un des plus grands obstacles à une vie sexuelle épanouie après l’arrivée d’un bébé est le manque de sommeil, alors le cododo peut, en réalité, être une solution et non un problème. En réduisant le temps d’éveil nocturne des parents et en facilitant l’allaitement, le cododo contribue à un sommeil globalement plus efficace. Une étude de Kendall-Tackett (2007) a également montré que les parents pratiquant le cododo rapportaient un sommeil moins entrecoupé et une meilleure récupération.
Un bébé qui dort à proximité de ses parents a souvent moins de mal à se rendormir après un réveil nocturne, ce qui évite aux parents de passer de longues minutes, voire des heures, à essayer de le calmer. Cette meilleure gestion du sommeil peut indirectement permettre aux parents de retrouver plus rapidement de l’énergie et, par conséquent, de se sentir plus disponibles pour des moments de couple.
Une sexualité plus riche et plus spontanée
Plutôt que de voir le cododo comme une contrainte, il peut être perçu comme une opportunité de réinventer la sexualité. Une étude de Bartick et al. (2010) sur les effets du cododo montre que, loin d’être une source de frustration, cette pratique peut encourager des moments plus spontanés, intenses et même plus fréquents.
D’ailleurs, la diversité des espaces et des moments pour l’intimité peut renforcer le désir et la connexion au sein du couple. Plutôt qu’une routine nocturne figée, le couple se retrouve à devoir innover, ce qui peut raviver le désir et redonner une nouvelle dynamique à la relation amoureuse.
Conclusion : sortir des stéréotypes
Vous l’aurez compris, non, le cododo n’est pas un frein à la sexualité, mais devenir parent, si !
Ce partage de sommeil est avant tout une adaptation aux besoins du bébé et des parents, qui peuvent toujours trouver des solutions pour maintenir une vie intime épanouie. Plutôt qu’une contrainte, il peut devenir une opportunité d’explorer une sexualité différente, plus variée et réinventée.
Ce qui compte, c’est la communication et l’adaptabilité du couple. En sortant des idées préconçues et en acceptant que l’intimité ne se limite pas à la chambre conjugale, le cododo peut s’inscrire dans une dynamique familiale épanouie, où chacun trouve sa place.